Du PowerPoint à l’action : bâtir une feuille de route qui vit

2025-09-22 06:42 AM - Par Jason Savage

Ne vous méprenez pas : j’utilise PowerPoint moi-même presque tous les jours. C’est un outil précieux pour présenter des idées, structurer des réflexions et engager des discussions. Le problème n’est pas PowerPoint en soi, mais la tentation de s’arrêter à une belle présentation statique, sans aller plus loin dans la mise en action.


L’enjeu, ce n’est donc pas l’outil, mais la façon dont on s’en sert. Trop souvent, le plan stratégique reste au stade de la présentation sans jamais devenir un guide pour l’action. Résultat : beaucoup de dirigeants de PME se retrouvent avec un beau plan, en PowerPoint ou en PDF, et six mois plus tard, rien n’a changé dans l’entreprise. Ces documents, aussi impressionnants soient-ils, finissent trop souvent sur une tablette, oubliés, parce qu’ils ne trouvent pas leur place dans le quotidien.


Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé : plusieurs équipes consacrent temps et argent à ces exercices, mais le résultat reste le même. Les faits confirment ce que vivent beaucoup de dirigeants : le problème n’est pas de « penser », mais de traduire la stratégie en résultats. Des travaux récents montrent que les transformations qui réussissent s’appuient sur quelques pratiques d’exécution robustes — priorités claires, boucles de rétroaction (feedback), responsabilisation — sinon elles s’essoufflent (Harvard Business Review, Transformations That Work).

Pourquoi ces plans échouent-ils ?

Derrière cette réalité, on retrouve toujours les mêmes irritants :

  • Trop vague pour guider l’action. Des phrases inspirantes, des objectifs nobles… mais rien de concret pour le représentant des ventes, le responsable de production ou l’équipe au quotidien. Sans mode d’emploi clair, les gens retournent vite à leurs anciennes habitudes.
  • Pas connecté au terrain. Quand la stratégie est développée en vase clos, sans tenir compte des réalités manufacturières, elle ne parle pas aux équipes. Résultat : le plan est perçu comme déconnecté, et donc ignoré.
  • Approche générique. Beaucoup de PME reçoivent des plans « copiés-collés », construits sur une méthodologie rigide qui ne reflète pas leurs particularités. Sur papier, ça a l’air professionnel. Dans la vraie vie, ça ne colle pas.
  • Pas de suivi. Même le meilleur plan ne se mettra pas en œuvre tout seul. Sans mécanisme de suivi, sans responsables clairs, personne ne sent que « c’est son plan ». Il devient rapidement obsolète, faute d’être nourri et ajusté.

Bref, le problème n’est pas de penser, mais de penser sans prévoir l’exécution.

La réflexion stratégique : une étape indispensable, mais insuffisante

Soyons clairs : il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Beaucoup d’entrepreneurs que je rencontre n’aiment pas la réflexion stratégique. Ils en ont gardé de mauvais souvenirs : exercices théoriques, jargon, ateliers interminables… et aucun impact concret ensuite. Mais dire que la stratégie est inutile serait une erreur.


La réflexion stratégique reste essentielle. Elle permet de clarifier où l’entreprise veut aller, pourquoi et dans quel horizon de temps. Sans cette vision, on navigue à vue. C’est l’équivalent de régler le GPS avant de démarrer la voiture : indispensable, mais ça ne suffit pas pour arriver à destination.


Là où tout se joue, c’est dans le passage de la réflexion à la planification de l’exécution. Trop d’entreprises s’arrêtent à la phase « pensée » et n’entrent jamais dans la phase « faire ». Comme le souligne une analyse du MIT Sloan, il est crucial de concevoir une stratégie prête pour l’exécution : relier les priorités à la vision, nommer les vulnérabilités critiques et concentrer l’entreprise sur ce qui compte vraiment (MIT Sloan Management Review, How to Develop Strategy for Execution).

Bâtir une feuille de route qui vit

Alors, comment passer du document figé à un outil qui guide vraiment l’action ? Voici quelques principes simples et pragmatiques.

1. Co-construire avec les équipes

Un plan qui vit est un plan auquel les gens croient. Cela commence par impliquer vos équipes dès le départ. Vos représentants des ventes savent quelles objections reviennent toujours. Vos gens en production savent où ça bloque. Les intégrer, c’est assurer que la feuille de route parle leur langage.

2. Prioriser sans pitié

Tout ne peut pas être prioritaire. Identifiez trois à cinq chantiers majeurs et concentrez-y vos énergies. Un plan trop chargé devient vite ingérable. Mieux vaut avancer solidement sur quelques fronts que s’éparpiller.

3. Définir des objectifs SMART (spécifiques, mesurables, ambitieux, réalistes, temporels)

Un objectif doit donner une direction claire et être mesurable. Exemple : « augmenter de 15 % le taux de conversion d’ici la fin de l’année ». L’ajout d’ambitieux est volontaire : viser trop bas n’inspire pas. Il faut oser se donner des cibles qui motivent.

4. Assigner un responsable par initiative

Chaque projet prioritaire doit avoir un « champion ». Cette personne devient responsable de mobiliser l’équipe, de coordonner les efforts et de rendre compte des progrès. Sans propriétaire identifié, une action finit toujours par se perdre.

5. Mettre en place un suivi régulier

Un plan vivant exige d’être revisité. Programmez des rencontres mensuelles ou trimestrielles où l’on fait le point : qu’est-ce qui a avancé, qu’est-ce qui bloque, que doit-on ajuster ? C’est dans ces moments que le plan reste vivant, plutôt que de dormir sur une tablette.

6. Communiquer et célébrer les progrès

Un plan qui vit doit être visible. Partagez régulièrement où vous en êtes, célébrez les petites victoires, ajustez quand c’est nécessaire. Chaque fois que vos équipes voient que le plan évolue, elles comprennent qu’il sert vraiment à quelque chose.

De la présentation à l’action

Les belles présentations n’ont jamais fait croître une PME manufacturière. Ce qui fait la différence, c’est une démarche qui lie réflexion stratégique et planification de l’exécution. L’une sans l’autre ne donne rien.


En fin de compte, un plan n’a de valeur que s’il vit. C’est-à-dire s’il guide les décisions, structure les priorités et aligne les équipes au quotidien. Abandonner les plans PowerPoint figés, ce n’est pas renoncer à la stratégie. C’est au contraire donner vie à la stratégie par l’action.


Jason Savage

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